Ce qui suit a été écrit avant la tuerie de Nice (14 juillet), pour tenter de rassurer les camarades de l’étranger qui voyagent, et reçoivent à travers divers médias (y compris ceux des activistes français) l’image d’une France un peu à feu et à sang. Outre l’inquiétude quotidienne que des actions « terroristes » imprévisibles et incontrôlables de ce genre peuvent susciter, peu de changement à ce que nous avions écrit fin juin. Sauf peut-être de constater que les médiatisations de tout événement de quelque importance mondiale (le pseudo-coup d’Etat en Turquie, l’intronisation de Donald Trump aux Etats-Unis, l’état d’urgence en France, etc.) relègue aux oubliettes temporaires ce qui faisait la une des médias la veille (qui parle aujourd’hui des migrants ou de Nuit debout ?) (1)
Quelle était la vie à Paris en ces jours de fin juin 2016 ? Les questions posées par des camarades étrangers laissent penser qu’ils croient trouver ici, d’après les informations diverses qu’ils recueillent, une vie quotidienne totalement perturbée par une montée des conflits. Paris devait connaître effectivement le 28 juin la douzième grande manifestation contre la loi dite El Khomri (du nom de la ministre du travail) ou plus simplement « loi du travail », qui fut présentée en conseil des ministres le 9 mars.
Sauf pour l’énorme déploiement des forces de répression (2 000 à 3 000 
policiers pour les dernières manifestations) et les perturbations 
causées dans le trafic routier, la vie à Paris n’a guère été troublée 
depuis le début de ces actions de résistance. Il n’y a eu aucun manque 
de ravitaillement, si l’on excepte une grève dans les transports 
ferroviaires pour des questions spécifiques aux cheminots aujourd’hui 
terminée, les transports ont en général fonctionné selon leurs horaires,
 les terrasses des cafés étaient abondamment remplies chaque soir, les 
écoles et les universités sont ouvertes et les examens se sont déroulés 
normalement, les matchs de l’Euro de foot n’ont été troublés que par les
 débordements nationalistes des hooligans. Si des commandos de quelques 
centaines de personnes peuvent effectuer des raids nocturnes sur le 
siège de la CFDT ou de la CGT, cela reste très marginal et ne trouble en
 rien la vie de la ville. Pendant les cinq derniers mois, mis à part 
quelques points forts temporaires, cette situation a été à peu près ce 
que je viens de décrire, bien qu’il se soit passé des événements qui 
valent la peine d’être notés, notamment quant à l’évolution des 
différentes composantes du mouvement d’opposition à la loi El Khomri. 
C’est en ce sens que je pense examiner séparément chacun de ces 
différentes composantes tout en insistant sur le fait que bien qu’elles 
soient restées distinctes, elles n’ont pu se développer que dans un 
contexte global et ont pu converger occasionnellement.
J’ai séparé quatre de ces composantes : les étudiants, les syndicats et 
les travailleurs, « Nuit debout » et la marginalité des activistes dont 
les frontières sont mal définies, qui peuvent se retrouver dans un même 
événement décidé par l’une ou l’autre de ces composantes. Pourtant, 
avant d’entrer dans les détails de la situation en France et le rôle 
qu’ont pu y jouer les différentes composantes, je dois expliquer ce que 
je considère comme plus important, le contexte global dans lequel ces 
composantes opèrent et les situations respectives dans la composition de
 classe, ce qui explique à la fois leurs convergences et leurs 
différences.
Un mécontentement général
Ce qui est commun à toutes, c’est un mécontentement général. Ce mécontentement s’est développé dans un rejet des structures politiques, des politiciens ; motivé par leur impuissance face aux problèmes économiques, sociaux et environnementaux causés par l’activité capitaliste mondiale. Ce rejet a été pour la France renforcé par la désillusion de ceux qui avaient encore pu croire aux promesses du présent président social-démocrate. On pourrait penser qu’un mécontentement aussi généralisé donnerait naissance à un puissant mouvement unifié mais on est contraint d’admettre que ce n’est pas du tout ce qui est arrivé dans ces derniers mois. Les conséquences de ce mécontentement sont très diversement appréciées et avec de grandes variations selon les positions dans les structures de classe (2). Parmi la masse imposante des salariés on peut distinguer trois catégories : ceux avec de hauts revenus, ceux avec des revenus moyens et ceux avec de bas revenus ; chaque catégorie montre des réactions très différentes devant ce qui semble être un mécontentement général. La catégorie la plus basse doit d’abord lutter pour son niveau de vie qui pourrait engendrer une plus grande implication dans les luttes : pourtant, cette catégorie ne fut que très rarement impliquée dans le actions de ces cinq derniers mois, et certainement pas d’une manière massive. La raison en est que toutes les dispositions (allocations diverses) destinées à pallier les difficultés matérielles des bas revenus sont toujours en place avec une certaine efficacité sociale, bien qu’elles puissent avoir été quelque peu réduites au cours des années récentes. D’autre part, ceux qui sont victimes d’un emploi précaire quelles qu’en soient les conditions, ne font rien qui puisse les faire tomber dans la case encore plus précaire du chômage.
La catégorie moyenne et celle des hauts revenus, dans une certaine 
mesure, sont moins concernées par l’insécurité de l’emploi et les 
questions de salaires mais peuvent quand même sentir une certaine menace
 d’insécurité, subissant dans le même temps une pression dans le 
travail, avec une dégradation des relations de travail, alors que dans 
la vie quotidienne sévit une dégradation parallèle des conditions de vie
 par la modification de l’environnement. Ces catégories des « classes 
moyennes » se retrouvent dans une revendication et certaines formes de 
militantisme touchant la « qualité de la vie », ce qui inclut aussi la 
possibilité de changer leur futur et celui de leurs enfants ; ces 
enfants, dans leur adolescence et après affrontent le même type de 
problèmes, renforcés pour eux par l’appréhension de ne pas trouver le 
job adéquat à leurs espoirs et à leur qualification. D’où l’implication 
particulière de ces jeunes dans le présent mouvement.
Toutes ces considérations définissent le caractère de ces luttes et 
leurs limites. Toutes les manifestations et/ou les grèves de cette année
 n’ont jamais attiré des foules aussi importantes que les mouvements des
 années précédentes (comme le CPE) et également la présence récurrente 
d’une « minorité agissante ».
En quoi consiste exactement la « loi El Khomri » ?
La loi « El Khomri » a été votée définitivement le 21 juillet par les
 députés. D’une certaine façon, bien des participants aux diverses 
manifestations n’ayant aucune autre opportunité d’exprimer leur 
mécontentement, n’étaient là que pour « marquer le coup ». De cela 
découle que pour beaucoup, il s’agissait non de discuter (contrairement 
aux syndicats), mais de demander le retrait de la loi, ce qui 
interdisait toute négociation à son sujet. Au-delà de cette position 
radicale (qui pour certains syndicats dont la CGT ne sont que des mots) 
et des discussions sur des dispositions de la loi, la plupart des débats
 tournent autour des conséquences sur les relations de travail des 
dispositions de son article 2 qui autoriserait dans certaines conditions
 des accords d’entreprise au niveau d’une usine la transgression des 
protections légales du code du travail. Il serait trop long d’expliquer 
ici en détail ce qui est en cause pour les syndicats et les 
travailleurs, mais il est possible d’en donner les grandes lignes :
u la « loi travail » n’est que la dernière tentative d’adapter les 
relations de travail à l’évolution des structures de la production 
capitaliste. On peut voir depuis des années une tendance constante, dans
 les discussions et les accords sur ces relations de travail, d’un 
transfert du niveau national et des branches professionnelles vers le 
niveau de l’unité de travail – usine ou bureau. On peut retracer les 
principales étapes de cette tendance avec les lois Auroux en 1982 (un 
tiers des dispositions du code du travail furent alors modifiées), les 
lois Aubry en 1999 (l’application de cette loi devait être discutés et 
mises en œuvre au niveau du lieu de travail avec les délégués syndicaux 
de l’entreprise) et la loi sur la représentativité syndicale de 2008 
(qui donnait aux délégués syndicaux de base reconnus représentatifs dans
 l’entreprise le pouvoir de discuter des conditions de travail sans 
avoir à suivre les directives nationales des confédérations). La loi El 
Khomri est seulement la dernière étape de cette évolution qui prive les 
syndicats nationaux de leur pouvoir légal d’intervenir dans les 
relations sociales de l’entreprise ;
u si l’on considère qu’actuellement moins de 10 % des salariés français 
sont syndiqués dans les quatre plus importantes confédérations 
syndicales (CGT, CFDT, FO, CFE-CGC) (et d’une manière très inégale 
suivant les branches professionnelles), on peut en conclure que le 
pouvoir des syndicats réside seulement dans ce que la loi (le capital) 
leur concède. De cela découle leur réaction contre ce nouveau pas dans 
les relations sociales qui touche leur position quant à leurs 
possibilités d’intervention dans les relations de travail, laquelle est 
liée par ailleurs avec leur conception du rôle du syndicat et aux 
positions de la majorité de leur base réduite. C’est seulement ce 
dernier point qui peut expliquer les positions différentes dans le 
présent conflit entre les deux principaux syndicats, la CGT et la CFDT ;
 de telles divergences à l’intérieur de la CGT peuvent expliquer les 
tergiversations de cette centrale tout au long des cinq mois de conflit ;
u la loi El Khomri ne crée pas une nouvelle situation dans laquelle les 
travailleurs seraient privés de quelque droit touchant leurs conditions 
de travail (c’est un des principaux arguments des opposants à la loi). 
Une telle position ignore le fait que dans les années écoulées on a vu 
de nombreux exemples de travailleurs d’une usine ou d’une entreprise 
pris dans un dilemme posé par les dirigeants : ou bien accepter de 
sérieuses dégradations de leurs conditions de travail ou bien être 
licenciés. La loi semble vouloir donner un cadre légal à de telles 
situations. Mais ce n’est pas tant la loi qui crée la situation dans ce 
conflit capital-travail que le rapport de forces qui donne la forme et 
l’issue du conflit.
Quel jeu joue la CGT ?
Comme nous l’avons souligné ci-dessus une partie importante de l’opposition et de l’action contre cette « loi du travail » a été motivée plus par le mécontentement général que par une opposition à un texte qui n’était pas encore bien défini et qui ne les concernait éventuellement qu’indirectement. En fait, les syndicats – les travailleurs qui les soutenaient éventuellement – ont constitué l’épine dorsale du mouvement d’opposition depuis son début jusqu’à aujourd’hui. Et la CGT était la vertèbre la plus forte de cette épine dorsale. Elle était engagée dans un double jeu (de concert avec deux autres centrales syndicales, Force Ouvrière et Sud). D’une part elle était le théâtre d’affrontements de tendances au sein de sa bureaucratie interne (les unes plus radicales, les autres en faveur d’un accord) et d’autre part elle tentait de faire pression sur le gouvernement dans l’espoir de maintenir ses positions légales. Au cours de cette lutte des mouvements plus indépendants des syndicats prirent à certains moment de la lutte de l’importance et ne pouvaient plus être ignorés, car ils donnaient le ton aux manifestations et aux grèves d’une manière quelque peu erratique. Il n’y eut en fait, dans ce mouvement de cinq mois, aucune réelle unité, aucune cohérence dans cette alternance entre manifestations et grèves.
Quand le projet de loi fut révélé à la mi-février, la CGT, de concert 
avec tous les autres syndicats, essaya de le modifier par des 
discussions directes avec le gouvernement, mais cette tentative 
rencontra une forte opposition des membres du syndicat. Séparément et 
indépendamment de l’appareil CGT, quelques syndiqués lancèrent une 
pétition sur Facebook qui réunit en peu de jours plus d’un million de 
signatures. Fort de ce succès ce groupe informel lança un appel à 
manifester pour le 9 mars, un appel suivi par les travailleurs mais 
surtout par les étudiants et lycéens. Ce mouvement indépendant prit de 
l’ampleur tout au long de mars (voir ci-dessous sur le mouvement 
étudiant) et contraignit la CGT à se retirer du processus de discussion 
(une position maintenue par la CFDT) et à organiser une manifestation 
commune pour le 31 mars, manifestation qui fut certainement une des plus
 imposantes de tout le mouvement. Mais après ce sommet, les 
manifestations n’arrêtèrent pas de décliner – sans aucune autre 
explication, pour ce qui concerne les lycéens et les étudiants, que les 
vacances scolaires.
Il est difficile d’expliquer pourquoi la CGT lança à la fin de mai une 
série de grèves illimitées (peut-être pour appuyer des négociations 
secrètes, et peut-être pour reprendre un contrôle sur le mouvement qui 
lui avait échappé en mars). Ces grèves furent lancées, soit dans des 
secteurs pour des problèmes spécifiques n’ayant rien à voir avec la loi 
El Khomri (comme à la SNCF où la lutte concernait la réforme du statut 
de cheminot), soit dans des secteurs où la CGT avait une forte influence
 : dockers, raffineries, employés de voirie, routiers. Si ces grèves 
causèrent quelque trouble elle ne conduisirent jamais à une grève 
générale et souvent même les déclarations de grève illimitée n’étaient 
guère suivies, comme dans les transports publics de la région 
parisienne. Et ces grèves limitées et peu efficaces (bien que parfois 
soutenues par l’apport d’activistes du mouvement) se désagrégèrent peu à
 peu. Depuis lors, le travail a repris partout.
Si la CGT pensait que ces grèves donneraient un second souffle au 
mouvement et notamment aux manifestations qui se poursuivirent jusqu’à 
récemment, ils manquèrent leur but parce que la participation à ces 
manifestations répétées était de plus en plus faible même si parfois 
elles prirent un tour plus violent. On peut s’interroger sur le point de
 savoir si derrière ces hauts et ces bas et les alternances grèves et 
manifestations il n’y avait pas une stratégie de museler le mouvement 
indépendant qui se dessinait.
Pendant ces mois de lutte, la CGT et les autres syndicats d’opposition à
 la loi semblaient vouloir créer une image de syndicats combatifs, se 
comportant pourtant d’une certaine façon comme une minorité agissante 
espérant amorcer par les diverses interventions le début d’un mouvement 
plus vaste. Cette position avant-gardiste était partagée par l’ensemble 
des acteurs que le mouvement associait sous la bannière du retrait de la
 loi. Cette position commune n’était nullement nouvelle et quelles qu’en
 soient les données et les avancées des tentatives diverses furent 
totalement inefficientes dans leur but de stopper le déroulement 
législatif dont il est évident aujourd’hui qu’elle sera finalement 
adoptée et mise en application.
Le mouvement étudiant et lycéen
Le fait que dans les premiers jours du mouvement d’opposition à la loi, ce furent les lycéens et les étudiants qui formèrent le noyau actif de cette opposition de février à mars démontre clairement que ces jeunes se sentaient concernés par cette réforme. Même s’ils étaient motivés par la crainte de ne pas trouver un emploi à la fin de leur carrière universitaire autant que par le mécontentement général endémique. Il était évident que les jeunes des banlieues n’ont pratiquement pas participé au mouvement étudiant et qu’ils furent à peine présent dans les actions autour de Nuit debout (la région parisienne compte 3 millions de collégiens et lycéens et 700 000 étudiants, il n’y eut à aucun moment une participation massive de ceux-ci). Bien que le mouvement étudiant ait été organisé par les syndicats d’étudiants et de lycéens il a pris rapidement un caractère autonome à la fois quant à de initiatives locales indépendant et en termes de radicalisme ;
Mais on doit considérer que cette autonomie et ce radicalisme ne 
réussirent pas du tout à briser les perspectives de carrière des uns et 
des autres : la participation étudiante et lycéenne s’arrêta 
pratiquement après les vacances de Pâques et le troisième trimestre 
scolaire se déroula sans anicroche : les étudiants et lycéens devaient 
passer leurs examens et ne souhaitaient pas briser leurs perspectives de
 carrière.
Nuit debout
Nous renvoyons, pour une tentative de compréhension de ce mouvement, à notre article « Nuit debout, un patchwork expression d’un ras-le-bol généralisé » (Echanges n°155, printemps 2016 – http://www.echangesetmouvement.fr/tag/nuit-debout/) qui soulignait les limites d’un rassemblement qui peinait à ressembler au « mouvement des places » apparu dans le monde les années précédentes, et qui n’a pas réussi à dégager une unité « au-delà de la volonté évidente de “continuer” » ce qui n’est même pas arrivé, les rassemblements s’amenuisant au long du mois de juin, pour disparaître ensuite.
Citons notre conclusion : « Même à travers ses limites et ses 
faiblesses, l’existence même de ce mouvement Nuit debout apparaît être 
un témoin et certainement une étape vers une prise de conscience 
collective de cette faillite d’un système. L’avenir dira sous quelle 
forme et à quelle dimension. Dans ce qu’elle sera en fait et pas du tout
 dictée par l’un ou l’autre, pas par nous en tout cas. »
Les marginalités
J’ai mis ce mot au pluriel parce que cette sorte d’action – distincte
 des plus importantes – a pu prendre différentes formes et était 
organisée (ou pas) par différents groupes œuvrant séparément ou ensemble
 de manières différentes en fonction de situations différentes. Ces 
groupes peuvent même se trouver en violente compétition – « plus 
révolutionnaire que moi, tu meurs ».
Je considérerai seulement ce qui est arrivé au cours de ces cinq mois de
 protestations sous toutes ses formes, pas seulement celles qui se 
rattachent aux actions violentes les plus souvent relatées, souvent 
répondant à la violence des policiers (mais pas toujours), pas seulement
 dans l’importance des dégradations matérielles mais aussi dans toutes 
sortes de perturbations, soit distinctes, soit en marge des plus 
importantes actions, en général les manifestations.
Je veux souligner deux points que je considère comme essentiels dans ces
 marginalités quels que soient leur forme et leur caractère :
u elles procèdent toutes du même concept d’avant-garde. D’un côté ceux 
qui les composent pensent que leur action au cours d’une manifestation 
va entraîner un grand nombre des manifestants vers quelque chose de plus
 important, une émeute par exemple (effectivement dans quelques 
manifestations on a pu voir s’amorcer une telle participation de 
manifestants « pacifiques », syndicalistes ou pas, mais ce fut toujours 
très limité). D’un autre côté ils peuvent penser par des actions 
directes distinctes donner un exemple de ce qui pourrait être fait pour 
sortir de l’inefficacité des récurrentes manifestations ;
u on doit noter que ces actions violentes peuvent être organisées par 
des minorités réduites sans être l’objet d’une répression de la part des
 autres participants (sauf par les services d’ordre syndicaux), parce 
qu’elles trouvent une sorte d’approbation pour leur action.
Mais la question que l’on peut se poser, au-delà de ce caractère 
minoritaire d’avant-garde, est dans la nature des buts de leur action. 
Ils ne furent jamais dans la position de perturber sérieusement la vie 
quotidienne normale durant ces derniers mois ni de changer le caractère 
des manifestations. Au-delà du fait de cette inefficacité, au-delà du 
fait d’avoir été réprimé parfois durement, une autre question se pose 
sur l’impact politique de ces tentatives de dépassement.
Quelques considérations politiques
Dans moins d’un an aura lieu en France une nouvelle élection 
présidentielle et le président présent pourrait de nouveau être 
candidat.
Pourtant, sa popularité et celle du Parti socialiste dont il est le 
représentant sont si basses que les chances d’un candidat 
social-démocrate d’être élu sont quasiment inexistantes.
D’où une simple question que nous nous sommes posé dès l’annonce de ce 
projet de loi El Khomri : était-ce aussi urgent de proposer au vote une 
loi aussi impopulaire, seulement capable de provoquer une forte 
mobilisation et d’accroître le discrédit de tous ces politiciens ?
D’une part, le fait que le gouvernement a été capable de maintenir le 
processus de vote de la loi devant une certaine agitation sociale (mais 
de faible ampleur il est vrai), peut lui assurer des gains politiques 
dans la « France profonde ». D’autre part, les actions minoritaires 
violentes (et leur surdimensionnement dans les médias) aussi bien que 
l’apparente radicalisation de la CGT peuvent renforcer cette réputation 
nouvelle de capacité de garantir la « loi et l’ordre ».
Il est difficile présentement de dire si le gouvernement socialiste 
mérite un diplôme de machiavélisme politique ou s’il a su habilement 
jouer sur les circonstances. Mais toutes les oppositions paraissent 
fondre au soleil des vacances d’été et la « loi du travail » a bien été 
votée et apparemment elle sera mise en œuvre. Et tous les acteurs 
pacifiques ou violents de ces cinq mois de lutte peuvent peut-être se 
vanter d’avoir été cocus. Une autre question peut aussi se poser : 
l’échec de ces six mois de manifestations diverses n’entraînera-t-il pas
 une démoralisation de ceux qui agirent durant ces jours, prévenant 
ainsi un mouvement de plus grande ampleur dû au mécontentement global ? 
Ce qui pourrait aussi faire penser à une autre manipulation du pouvoir.
H. S.
NOTES
(1) Cette logorrhée médiatique mériterait une étude sur la manipulation par les pouvoirs divers des événements permettant de reléguer l’important avec le surdimensionnement du ponctuel d’un intérêt mineur.
(2) Globalement, la baisse du niveau de vie en France peut s’exprimer en deux chiffres. En dix ans, la population française a augmenté de près de 10 % alors que le PIB est resté pratiquement stationnaire, ce qui signifie une baisse globale du niveau de vie, mais différenciée selon les catégories sociales.
A LIRE AUSSI
De nombreux textes peuvent apporter des éléments complémentaires ou des approches différentes. Nous ne pouvons les reproduire ici, ni même les citer tous.
– « Loi El Khomri, robots et mondialisation du capitalisme » 
(http://science21. blogs. 
courrierinternational.com/archive/2016/04/10/loi-el-khomri-robots-et-mondialisation-du-capitalisme-i-51551.html)
– « Nuit debout et citoyennisme : attraction fatale » (Yves, Ni patrie 
ni frontières) (http://www.mondialisme.org/spip.php?article2479)
– « Printemps 2016 : un mouvement inattendu »  (G. Soriano et Nicole 
Thé) : texte écrit pour la revue allemande Wildcat, et paru dans son 
n° 100. Accessible sur le site de Wildcat en  français (www. 
wildcat-www.de/fr/fr_ w100_nuitdebout.html)
– Feuille d’infos de l’assemblée de lutte d’Alès. Au sommaire : « Contre
 la loi travail: lutte générale et illimitée !! »  ; communiqués et 
récits d’actions ; une chronologie du mouvement social qui se construit 
aussi à Alès ; « C’est quoi l’assemblée de lutte ? »… 
https://exploitesenerves.noblogs.org/recit-de-la-journee-du-17-mai-a-ales/
D’autres textes que nous pouvons envoyer sur demande :
– « Le mouvement de mars 2016 » (signé Alain).
– « A propos du mouvement Nuit debout » (signé Raoul).
– « Face à la loi travail, tous debout. »
Et bien sûr les revues : 
Courant alternatif n° 262 (été 2016) : « Pas de vacances pour la lutte de classes », « La gauche et le maintien de l’ordre » ; Alternative libertaire n° 263 (juillet-août 2016) : « Révolte, retour sur un printemps brûlant », « Un printemps, deux CGT », « La bureaucratie nous divise, l’action nous unit ! », « Grabuge organisé… : attention au romantisme de la violence… et au crétinisme de la légalité » ; La Forge nos 574 (juin 2016) : « L’unité ouvrière et populaire en action », « La violence a un caractère de classe » et 575 (juillet-août) : « L’unité ouvrière et populaire en marche » ; « De la SFIO au PS, une longue tradition de violence contre les travailleurs et les peuples »…
Echanges et Mouvement - Dans le monde une classe en lutte, septembre 2016


Bonustrack
Mobilisierungsvideo für den 15. September für Strasbourg: Pour un mouvement irréversible
Bonustrack 2
(Teil 1 ist in Deutschland aufgrund des ganzen altbekannten GEMA Streits nicht anzuschauen. Wie es doch geht, sollen doch bitte die technic freaks noch mal erklären)